Pratyâhâra
Publié le 4 Novembre 2012
« LES CARNETS DU YOGA »
n° 309 - septembre 2012
A CŒUR OUVERT : Le retour aux sources, p. 14
Auteur : François ROUX
Dans son commentaire du sûtra II.54, le roi Bhoja, célèbre lecteur des Yoga-Sûtra au XIè siècle, fait remarquer qu’avec pratyâhâra les sens « demeurent en eux-mêmes ».
Ils retrouvent en somme leur vocation première qui est d’informer le corps des modifications de son environnement – jouant ainsi un rôle protecteur – et non de l’entraîner dans la ronde sans fin des stimuli extérieurs – jouant ainsi un rôle destructeur.
Cessant de tirer le contenu mental à hue et à dia, « l’activité sensorielle se délivre de l’emprise des objets extérieurs », selon l’expression de Mircea Eliade.
Il s’ensuit une étrange – parce que rare – et très douce sensation de sérénité : la conscience est enfin « en direct » avec le réel ; elle commence à percevoir le monde sans les multiples écrans d’une sensorialité cavalcadante, pour ne pas dire exacerbée.
« Alors, dit seulement Vyâsa – le plus respecté des commentateurs, dans son Yoga-Bhâshya – la sagesse (prajnâ) du yogi connaît toutes choses telles qu’elles sont ».
Cet état de redéploiement des sens a bien entendu des effets énergétiques considérables.
Assis dans une posture méritant pleinement le double qualificatif de « stable et aisée » que lui donne Patanjali, ayant rendu toute sa subtilité et toute sa lenteur à son souffle et conquis son autonomie à l’égard du monde extérieur, le yogi est alors à même d’aborder, avec quelque chance de succès, les trois derniers membres du yoga : la concentration, la méditation et la contemplation.
Retour aux sources de nos cinq sens, pratyâhâra apparaît alors dans une lumière toute différente.
Celle du moment privilégié où le yogi accède au prodigieux royaume du non mental.
Présenté par Catherine Cuney