Je ne sais rien
Publié le 24 Mai 2023
3è millénaire
N°146 – Décembre 2022
Extrait du dossier le non savoir : article Diane Gagné
"Je m'accrochais désespérement à la connaissance... m'en revêtais comme d'un costume"
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Nous voyons les connaissances spirituelles comme le moyen de nous sauver du monde incertain dans lequel nous vivons. Nous espérons qu’un savoir particulier va résoudre nos questions laissées sans réponses… nous avons peur alors de voir ce rien que nous sommes, ce fait que, fondamentalement, « je ne sais Rien de Rien », nous dit Diane Gagné qui témoigne.
« Je ne sais rien… Non, en fait, je ne sais "plus" rien. Parce que longtemps, j’ai cru savoir. J’ai cru que je comprenais.
En fait, je m’accrochais désespérément à la connaissance… m’en revêtais comme d’un costume. C’était mon plus grand mécanisme de protection, mon plus grand rempart contre ce monde qui m’effrayait tant.
Jusqu’à ce que TOUT s’effondre. Toute la structure psychologique, toutes mes certitudes quant à ce que je croyais être « moi ». Cherchant à comprendre ce qui arrivait, j’ai fait ce que savais faire de mieux j’ai lu. Me suis bourrée d’un nouveau « savoir ». J’ai tenté de comprendre le chemin sur lequel je venais de tomber. J’ai consulté, écouté, suivi des formations, rencontré des maîtres… j’en suis venue à m’éloigner également de ce qu’on appelle la « spiritualité ». Parce que… ce n’est qu’un savoir de plus. Qu’une tentative, plus ou moins réussie, d’encore une fois expliquer l’inexplicable.
Bref j’ai perdu l’intérêt pour les explications, les recettes, les leçons et tous ces gens qui sont légion maintenant, à vous dire comment être heureux, comment respirer, méditer. Vous expliquez les effets de la prochaine lune sur vos humeurs ou vous dire ce qu’est la réalisation ou l’illumination. L’excitation a disparu… tellement, que j’en suis venue à me demander pourquoi je continuais à faire de même.
Lorsqu’on pense comprendre, l’action naît. Elle nait de cette volonté à vouloir transmettre, vouloir partager son savoir et sa connaissance à l’autre. Mais lorsqu’on réalise qu’il n’y a rien à comprendre, mais simplement être ce que nous sommes, qu’est-ce qui porte l’être à agir, à faire ?
Peut-être que dans ce monde rempli de toutes sortes de peurs, ça vaut la peine de partager cela ? Peut-être que tout autant que tous les grands enseignements advaîtique, non-duels, zen, bouddhistes, chrétiens ou de ces amalgames spirituels modernes, ça mérite d’être exprimé ?
Peut-être que plutôt que de tenter de se créer de nouveaux personnages qui continuent de croire avoir compris ou être arrivés quelque part, plutôt que de trouver des explications au pourquoi des choses, on peut simplement commencer à accepter, à accueillir en notre sein et à aimer ce monde ?
Ce monde... Tel qu’il est… avec ses grandes opinions et ses grandes certitudes. Tels que nous sommes… avec tous nos personnages, y compris les personnages spirituels. Tels que vous êtes… avec vos forces mais aussi toutes vos faiblesses. Telle que je suis… avec les doutes qui subsistent et cette incertitude propre à la vie. Peut-être que je suis très bien telle que je suis à vouloir partager avec mon prochain la joie de vivre qui m’habite, l’amour de la Vie qui me porte et me pousse à vouloir rencontrer l’autre ? Quel qu’il soit, où qu’il soit, tel qu’il est.
Peut-être que je dois continuer de croire qu’il y a là, quelque part, des gens qui ont besoin d’entendre que la Vie c’est magnifique, que la souffrance ne doit pas être combattue, pas plus que tout le reste d’ailleurs et qu’en nous sommeille un Amour qui recèle un pouvoir qui nous permet de tout accueillir de la vie ?
Et c’est parce que je n’ai pas de réponse à ces questions que je continue. Parce que je sens, sans pour autant en avoir de certitude, que c’est le chemin que je dois suivre. Celui qui fera qu’à la toute fin, lorsque je fermerais les yeux sur ce monde. J’aurai finalement la réponse. Je saurai alors si c’est ce que de devais faire ou non. Si je suis passé à côté du truc ou non. Mais d’ici là, je ne sais pas.
Je ne fais que suivre ce mouvement de Vie, là en moi, qui me pousse à continuer de transmettre un peu de ce que je suis et de tout ce que je ne sais pas. De tout ce que je désapprends un peu plus à chaque jour. A cet oubli auquel je retourne, qui me permet simplement de moins en moins me questionner. Et tenter de simplement vivre la vie qui m’a été donnée du mieux que je peux. Avec tout l’amour dont je suis capable.
Mais, j’ai aussi compris que tout ça, ce que font les autres de leur vie, ce n’est pas très important. De même que le résultat de mes actions importe peu. Ce qu avec le temps me donne beaucoup de liberté et l’envie de créer. De créer ces textes que je vous écris, ces pensées, ces graphismes et ces images que je vous partage. Sans me soucier du reste. De faire plus de place à cet amour qui me pousse à partager. Qui me porte vers vous.
Et c’est parce que sais de moins en moins de choses, que j’ai de moins en moins de certitudes, que je m’autorise de plus en plus à aller vers vous pour partager .
On dit que le savoir libre…
Réellement ???
Moi je crois que c’est plutôt l’Amour.
« J’ai compris que le résultat de mes actions importe peu.
Ce qui me donne beaucoup de liberté et l’envie de créer »
Diane Gagné est accompagnatrice et enseignante spirituelle. Elle offre accompagnement, enseignements, témoignages et conférences. Ses nombreux écrits et partages oraux témoignent de son profond amour pour la Vie. Elle n’enseigne aucune tradition particulière, même si son cheminement l’a conduit à travers plusieurs approches : yoga, christianisme, Advaita (non dualité).
Site : https://diane-gagne.ca/