« Les plantes sauvages nous sauveront »
Publié le 18 Mai 2016
Plantes & santé
N° 167 - avril 2016
« La fleur au fusil », est le titre de l'ouvrage de Georges Oxley.
Pour ce biologiste, il ne s'agit pas de s'engager dans une guerre classique, mais de défendre les plantes sauvages, car il en est convaincu :
elles sont le salut de l'humanité, à la fois comme un indicateur et une ressource face aux problèmes de santé.
Propos recueillis par Adeline Gadenne
Plantes & Santé - Quelle a été votre motivation d'écrire ce livre sur l'importance des plantes sauvages ?
Georges Oxley : Après vingt cinq ans de travail sur les sols, je me suis rendu compte que nous avions dans notre corps la même vie que dans le sol. Toutes les bactéries, les champignons et les virus qui vivent dans notre tube digestif forment notre biome (appelé aussi microbiote) que nous acquérons au cours de notre vie par nos expériences et via notre environnement. La planète nous parle d'elle, mais aussi de nous-mêmes, puisque nous retrouvons les bactéries du sol dans notre tube digestif. Si nous maltraitons notre terre, cela va se répercuter sur notre santé. Les plantes nous alertent sur l'état de notre planète et de notre santé.
P.& S. - Comment est née votre fascination pour les plantes sauvages ?
G. O. : Je suis gourmand, alors j'ai commencé par vouloir connaître les plantes comestibles autour de moi. Quand on est capable de se nourrir dans la nature on acquiert une liberté, une autonomie et un regard totalement différent sur la planète.
Le caractère bio-indicateur des plantes fait aussi qu'en un simple regard, on connaît l'état du sol. Si elle pousse à un endroit, c'est pour résoudre les problèmes. Elle pousse pour « remédier », et ce remède pour le sol agit aussi sur notre santé... Exemple : au Congo, où je travaille actuellement, j'ai trouvé de nombreux champignons et plantes qui contiennent des principes actifs contre le paludisme. Fleur au fusil ou pas, il nous faut les défendre, car c'est une manière de se soigner pour beaucoup de gens pauvres.
P. & S. - Vous commencez votre livre par l'histoire du siège de Sarajevo pendant lequel la population a survécu grâce aux plantes sauvages. En quoi cette histoire est emblématique pour vous ?
G. O. : Avec mes amis de Sarajevo, j'ai recherché les plantes qui poussaient derrière les obus. Un obus, ça remue la terre, ça laboure. C'est ce qu'il y a de pire pour un sol. Mais par la suite, des plantes s'installent rapidement qui viennent nourrir et soigner, jusqu'aux traumatismes dus aux blessures. Il y a d'abord le tussilage qui répare la terre et permet à d'autres plantes de pousser. En même temps, ce tussilage qui contient beaucoup de sucres permet de réparer la peau, bien utile en cas de blessure de guerre.
P. & S. - Vous faites aussi l'apologie de la permaculture, pouvez-vous en dire plus sur cette pratique agricole ?
G. O. : En agriculture, la diversité et l'opulence sont essentielles, à l'inverse de notre tendance productiviste à toujours rechercher uniformité et concurrence. On retrouve l'intérêt de cette diversité en permaculture. On apprend à connaître les plantes sauvages car nombre de « mauvaises herbes » sont absolument délicieuses. Je m'indigne quand je vois les gens arracher le chénopode, l'une des plantes les plus nourrissantes, aussi riche en calcium qu'un verre de lait et aussi protéinée que la viande bovine.
Les plantes offrent autant d'espoirs que de solutions.
Proposé par Monique Guillin
Pour aller plus loin : http://www.franceculture.fr/emissions/ne-parle-pas-la-bouche-pleine/des-fleurs-et-des-fusils