Comment les Yoga-sûtras nous aident dans notre pratique : Abhyâsa – Vaïrâgya

Publié le 7 Décembre 2022

Les Carnets du Yoga

Septembre 2020 – n° 389

 

D’après la rubrique de Olivier Mazet « Textuellement »

 

Dans les sûtras de I-5 à I-11, Patanjali nous décrit les dysfonctionnements de notre fonction globale d’intelligence, les vrittis.

Au sûtra I-12, il nous indique que la pratique d’abhysâsa-vaïrâgya élimine les vrittis.

Les sûtras suivants, de I-13 à 1-19, nous expliquent comment pratiquer abbyâsa-vaïrâgya.

Abhyâsa consiste à s’établir en soi-même,

Vaïrâgya est un état de non-désir, de lâcher-prise.

             Pratiquer abhyâsa, I-13, c’est faire un effort intense pour s’installer, s’établir en soi-même, toujours plus en soi-même, comme un centrage de plus en plus profond.

         Cette pratique, I-14, ne sera une base solide que si elle est pratiquée avec ferveur, persévérance, de façon ininterrompue, et pendant longtemps. Nous le savons tous. Une pratique hebdomadaire durant quelques mois ne donne pas les mêmes résultats qu’une pratique quotidienne pendant plusieurs années.

        I-15, s’établir toujours plus en soi-même, de manière intense, persévérante nous donne un certain recul par rapport à ce qui nous entoure. Se développe une vision claire, une connaissance intime de ce nous voyons et entendons. Nous recevons les informations sans les étiqueter, sans leur ajouter de « statut d’expérience » (cf. sûtra I-11). L’illusion de posséder quoi que ce soit devient une évidence. Nous cessons de vouloir prendre, de vouloir nous approprier ce avec quoi nous sommes en relation. Nous vivons dans un état de non-désir (vaïrâgya).

        I-16, Nous retrouvons la capacité de vivre à partir de nous et non plus en fonction des stimulations extérieures. Hors du champ d’attraction des stimulations sensorielles, intensément établi en nous-même, nous générons notre propre vie, à partir du « Soi », en totale liberté. C’est pour Patanjali, le plus haut degré du lâcher-prise, être détaché de l’influence des gunas (modalités énergétiques de la « Manifestation »).

         I-17, Notre pensée fonctionne avec des informations sans « statut d’expérience ». Nous voyons, recevons et analysons directement ce qui nous entoure. C’est un état de liberté, de joie sans objet. Nous continuons à avoir le sens de notre individualité, à ressentir notre « je », mais il n’est plus identifié. Nous sommes libres, sans désirs, en relation avec notre principe même d’existence.

         En continuant à pratiquer abhyâsa, nous expérimentons jusqu’au non-désir de se sentir exister en tant qu’individu. Nous sommes en connexion directe et totale avec le monde, sans aucune séparation, sans avoir le moindre but individuel (vaïrâgya). Patanjali nomme cet état asamprajnâtah.

         I-19, Si nous persévérons dans la pratique d’abbhâsa – vaïrâgya, les vrittis finissent par disparaître. Nous expérimentons un état stable. Nous ne nous sentons plus séparés du monde. Nous sommes immergés dans la manifestation de manière désincarnée. Les Sages, les Swamis, disent « je suis Cela ». C’est l’état de yoga.

         Abhyâsa-vaïrâgya est la seule et unique pratique que décrit Patanjali pour éliminer les vrittis, donc pour créer les conditions de l’expérience de l’état de yoga. S’établir en soi-même, dans un état de lâcher-prise. Laisser la vie s’imprégner en nous sans mettre d’étiquettes. Vivre, penser et exister à partir de cette mémoire « non vrittis ». Puis lorsque les anciennes mémoires avec « statuts » finissent par ne plus être accessibles, alors, juste faire partie du mouvement de la vie. Voilà la proposition de Patanjali.

         Dans notre pratique de yoga, nous travaillons à créer les conditions propices à l’expérience des états décrits dans les Yoga-sûtras. Alors, posons-nous toujours la question de savoir, si ce que nous faisons ou faisons faire à nos élèves, met bien en œuvre abhyâsa-vaïrâgya. Pour cela, dans le prochain numéro de la revue, nous verrons avec le Livre II les indications que nous donne Patanjali.

 

Proposé par Catherine Cuney et Martine Oehl

 

Rédigé par UCY

Publié dans #Spiritualité-philosophie

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