Comment les Yoga-sûtras nous aident dans notre pratique : Asana, les prérequis
Publié le 14 Décembre 2022
Les carnets du yoga
septembre 2022 – n° 409
D’après la rubrique de Olivier Mazet « Textuellement »
Troisième étape après yama et nyama, âsana pose la pratique posturale sur le chemin du yogi. Ce premier article d'une série de trois dédié à cet anga revient sur la préparation indispensable à l'expérience d'âsana qui constitue le socle du Yoga.
Dans le sûtra II-46, Patanjali définit âsana « Sthirasukham âsanam».
La racine « sthâ » que nous retrouvons dans stabilité. « sthira » veut dire ferme, solide durable. « Kha » représente l'espace et le préfixe « su » veut dire heureux.
Âsana c'est être fermement « établi dans un espace heureux »,
selon la très belle interprétation de Gérard Blitz.
Ce n'est pas shtira et sukha, c'est sthirasukha, en un seul mot, les deux en même temps. Patanjali parle d'une situation où nous expérimentons un affermissement, une sensation de paix et de bonheur dans la fermeté. Voilà âsana.
Le sûtra ne parle pas de corps, ni de posture, il décrit un état. Mais comment expérimenter cet état ? Heureusement, les grands Maîtres du passé nous ont fourni un moyen privilégié, les postures appelées aussi âsana et que nous utilisons dans la pratique de yoga selon les déclinaisons diverses épousant les différentes époques de l'histoire.
Quand une posture nous est proposée nous devons nous interroger sur le choix de cette posture. Comment fonctionne-t-elle ? Comment la pratiquer ? Quels effets va-t-elle avoir ?
Une grande partie de la réponse se trouve dans la position de la colonne vertébrale. La moelle épinière est un prolongement de l'encéphale. Elle fait partie de notre système nerveux. Elle reçoit de l'information, la traite et fournit des réponses pour l'équilibre, la motricité... La colonne abrite une grande partie de notre intelligence végétative. En mettant notre colonne dans une certaine position et en laissant agir la posture, nous obtenons des effets neurophysiologiques. Nous devons prendre particulièrement soin de notre colonne pendant la pratique pour que les effets soient bénéfiques. Si nous la brutalisons, les conséquences seront néfastes.
Les postures peuvent être difficiles parce qu'elles sont différentes des mouvements quotidiens. Dans la séance de yoga, une préparation physique appropriée est indispensable pour nous permettre, à nous Occidentaux, de prendre ces postures sans se faire mal et d'en recevoir les effets.
Âsana, troisième anga, est le premier volet de l'ashtanga consacré à ce que nous appelons la pratique du yoga.
Juste avant, tapas, svâdhyâya et ishvara pranidhâna, qui forment le Kriyâ Yoga. Ils constituent un prérequis pour l'action, qui éclaire notre pratique. Quelles indications nous donnent-ils pour que nous puissions expérimenter l'état d'âsana en prenant ces postures ?
Avec tapas, la pratique est intense, régulière, continue et s'expérimente sur un temps long. Nous devons faire preuve de persévérance.
Svâdhyâya, comme abhyâsa, rappelle que c'est seulement une expérience personnelle. Il n'y a rien à prendre à l'extérieur, à appliquer ou à copier. Nous pratiquons à partir de nous. Nous prenons les postures avec nos particularités, nos capacités et nos limites. Il nous faut entrer dans les postures avec humilité, sans vouloir copier une forme, en ajustant à partir de nous ; alors l'effet peut se produire.
Ishvara pranidhâna nous demande de pratiquer sans but précis, sans vouloir obtenir des bénéfices personnels. C'est totalement inhabituel pour nous, étrange et portant logique : tout objectif aurait une signification, un sens, donné par les statuts d'expérience issus de notre mémoire. Ce serait donc un vritti. Pratiquer le yoga pour obtenir un vritti, quelle absurdité !
Gérard Blitz disait à propos de la pratique, des postures :
« il n'y a rien à prendre, il y a juste à laisser.... »
Revenir à ces fondamentaux nous permet de mieux comprendre dans quelle attitude mentale aborder la pratique, préparer, puis entrer dans les postures. Patanjali va ensuite nous indiquer ce qui peut se produire : l'état d'âsana.
Proposé par Catherine Cuney et Annie BIanchi