Le bonheur simple : le simple bonheur
Publié le 5 Juillet 2023
3ème millénaire
N° 147 mars 2023
Dossier : « l’innocence »
« La joie de vivre est peu répandue », nous dit Kaveen. Car elle s'éveille avec la découverte de notre « visage originel », par « l'art de la présence...qui n'a plus peur d'être heureux ».
Il y a tellement de qualités différentes de bonheur.
Le bonheur qui dit « Aujourd'hui, je pourrais mourir, ça irait très bien ».
Et celui qui dit : « De savoir que je suis heureux me rend heureux ».
Et celui qui dit : « Quand je tombe amoureux, j'ai envie d'embrasser tout le monde, arbres compris ».
Et celui qui dit : « On ne peut pas tout comprendre ».
Et celui qui dit : « On est tous ensemble les feuilles du même arbre ».
Ah ! Que de bonheurs....
Et celui qui ne dit rien, qui dure peu, puis s'envole en silence....
La joie de vivre est peu répandue, essentiellement parce qu'elle requiert une participation innocente. Elle est étrangère à ces loisirs qui sont la plupart du temps des consommations passives et modèles culturels variables, mis tous identiques en ce qu'ils nécessitent tous une adhésion aveugle et une soumission sans conscience.
Les loisirs sont cette clé de chez soi qu'on oublie à l'intérieur et où, selon une forte expression, on reste « enfermé dehors ».
La joie de vivre n'est pas de l'ordre de la distraction, mais tout au contraire de l'attention à soi. La recherche de son « visage originel » consiste bien souvent à lui mettre un masque commode afin de se donner une identité complaisante et contrôlable. Le visage originel est une innocence, une spontanéité, une invisible présence... Ce n'est pas un visage, comme une photo passeport, ni une quelconque définition psychologique ou morphologique d'un individu.
Le vrai visage, c'est quand on est dans un espace indicible, qu'on expérimente comme l'espace du bonheur.
La méditation ne construit pas de mur. Elle les détruit.
Quand la soif de bonheur authentique commence à faire craquer les vieilles planches de la personnalité, on se trouve souvent coincé entre ce nouvel espace de grâce et de gratitude, entre rires et pleurs de joie, et les routines de la misère, de la perte ou de l'oubli de soi.
La partie la plus décisive de la méditation, après l'avoir apprise dans des groupes, consiste à la faire rebondir dans la vie de tous les jours.
Il s'agit de transformer la qualité qu'on met à l'accomplissement des tâches envisagées comme des automatismes.
Elles étaient accomplies par devoir, par nécessité, par obligation, par mimétisme, par conformisme, par peur cachée du changement.
Les frustrations permanentes qu'elles engendraient étaient occasionnellement compensées par des distractions, sexuelles ou sentimentales, des satisfactions et des petits plaisirs. Et ainsi allait la vie, d'un jour à l'autre, sans sa médiocre routine.... Il y a dans la vie d'un médiateur un moment très important où il faut oser ouvrir les vannes de cette nouvelle grâce, pour qu'elle inonde aussi cette vie quotidienne.
Une forme de peur ou de résistance à cette expansion de la conscience est la séparation. On construit un mur entre les moments de travail sur soi pour préparer l'avènement de la présence, et les fonctions qu'on continue de remplir dans sa vie quotidienne. La méditation ne construit pas de mur. Elle les détruit.
Peur, résistance, indifférence, tous ces obstacles sur le chemin d'une vie intégrée, réunifiée, peuvent se surmonter en envisageant la vie quotidienne comme un jeu. Le ludisme, où le plaisir de jouer élimine la volonté de gagner ou la peur de perdre, est une forme efficace que la méditation peut donner à la vie quotidienne.
L'art de la présence est par définition ludique. C'est un art qui n'a plus peur d'être heureux.
Kaveen a été un disciple du maître spirituel Osho ; il a suivi la voie de la méditation pendant plus de 35 ans sous son inspiration. Il poursuit actuellement son travail avec des personnes engagées dans la méditation. Kaveen est l’auteur de « la promenade : Correspondance à propos de méditation »
Extrait :
Un promeneur n'a pas
de destination particulière,
Il jouit simplement de la promenade.
Où qu'il arrive, il est heureux.
La terre entière lui appartient,
L'existence entière lui appartient.
Il ne va nulle part,
Il ne prévoit pas d'aller où que ce soit.
Où qu'il se trouve, il est toujours là.
Osho
Proposé par Catherine Cuney et Annie BIanchi