Alcool et yoga
Publié le 7 Février 2018
Les Carnets du Yoga -
N° 362 – Décembre 2017
Extrait d'un mémoire de professeur de yoga FNEY : D. Bonnet, -
Dans cette seconde partie de son mémoire D. Bonnet, approche de plus près son expérience et analyse les conséquences de la pratique du yoga pour vaincre une maladie addictive.
J’ai découvert le yoga par hasard. On dit que le hasard n’existe pas ! Pour moi il a été très heureux. Il y a sept ans, à la suite de mon dernier sevrage en clinique, une amie m’a incitée à l’accompagner à son cours de yoga. J’y allais surtout pour lui faire plaisir car je savais qu’elle essayait de m’aider. A l’issue du premier cours je me suis sentie défatiguée, détendue. C’était une impression nouvelle pour moi qui aimais m’épuiser.
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Ma première découverte fut celle de la modération. Je n’ai pas intégré cette notion tout de suite évidemment ! C’était trop nouveau, trop « pas moi ». Mon professeur avait semé cette petite graine qui germait tout doucement en moi. Il m’est difficile d’expliquer cette lente transformation mais il est certain que je me suis prise en charge au bout de quelques mois de pratique, plus exactement je découvrais l’urgence de prendre soin de mon corps. Mes rechutes demeuraient mais étaient moins longues et de plus en plus espacées.
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Pas besoin de produit pour me sentir exister. D’ailleurs je ne peux plus dire que j’existais avec l’alcool. C’était juste un leurre, un déguisement qui cachait ma vraie nature.
Avec le recul, je peux dire que l’état d’alcoolisation est en complète opposition avec les dix règles, les yamas et niyamas, des Yoga-Sutras de Patanjali. A mes débuts, je ne connaissais pas ce beau texte, mais mon professeur, sans le citer, exprimait ce qu’il contenait. Sans le savoir, je commençais à appliquer dans ma vie quotidienne deux des Yamas : Ahimsa, la non nuisance et Brahmacharya, la modération.
"Si quelqu’un est installé dans la non violence, autour de lui l’hostilité disparaît" (II-35)
"Etre établi dans la modération donne une bonne énergie de vie" (II-38)
"Primum non nocere - Ne pas nuire, ne pas se nuire" Hippocrate
La prise de conscience du respect de mon corps dans les asanas m’amena à réfléchir sur l’attitude que j’avais vis-à-vis de mon hygiène de vie et en premier lieu l’alcool. Je tentais d’appliquer la non-violence à moi-même, je modérais mon ardeur à vouloir faire des postures parfaites et belles à regarder.
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Le yoga n’est pas une pilule du bonheur, ou une coupe de champagne, que l’on absorbe machinalement en attendant qu’elle fasse son effet. Il faut se prendre en charge, se responsabiliser. En étant à la fois acteur et observateur de mes comportements, je deviens graduellement le capitaine de mon vaisseau et arrive à un meilleur contrôle de mes émotions, de mes actions et de mes comportements. Je prends du recul et deviens témoin de mes ressentis.
Quand l’envie de boire me vient, je prends le temps maintenant d’observer cette pulsion en respirant calmement. Le temps d’accompagner ces pensées en me centrant sur la circulation de mon souffle et l’envie disparaît.
Je deviens l’auteure de mes comportements en toute conscience, je ne suis plus dans la passivité et le laisser-aller. Je suis dans l’action et le lâcher prise. J’ai confiance en moi.
Le yoga amène à une acception de ce que l’on est, tant sur le plan physique que sur le plan mental. S’accepter c’est lâcher prise avec le jugement que l’on a de soi et vivre avec nos points forts mais aussi avec nos points faibles.
J’ai maintenant fait la paix avec mon passé d’alcoolique, j’accepte cette épreuve comme un tremplin pour un mieux-être et une meilleure connaissance de mon intériorité. Je ne peux renier ce douloureux passé, je le regarde en face.
Pouvoir en parler sans honte m’aide à accepter celle que j’étais et me permet ainsi d’aller vers un futur plus serein en vivant l’instant présent sans le poids de mon passé. Cela transforme la vision que j’ai de moi, je ne suis plus seulement la femme qui a bu.
Proposé par Catherine Poulain Bourdichon
Pour aller plus loin : L'article en entier est disponible à la bibliothèque dans la revue les carnets du yoga N° 362.