Yoga Tibétain : le corps, véhicule vers l’Eveil
Publié le 1 Avril 2010
Revue SANTE YOGA
N°84 Mai 2008
par Lama Shérab Namdreul
« si le Hatha-Yoga se réfère à l’Hindouisme, le Yoga Tibétain fait partie de la tradition bouddhique. »
L'expression « yoga tibétain » n'est pas signifiante en soi car elle fait uniquement référence à une caractéristique géographique et omet le contexte spirituel dans lequel s'inscrivent les pratiques yogiques.
« Nangpé yoga » est fréquemment utilisé mais cette expression pose un problème d'ordre linguistique : Nangpé est un terme tibétain qui signifie « intériorité » tandis que yoga vient du sanskrit "joug" et signifie "union.
Le terme tibétain pour yoga, Neldjor, signifie « union » (djor) avec la nature essentielle de notre esprit (nel).
Il est également juste de parler de « yoga bouddhique », car ce qui caractérise avant tout le « yoga tibétain », c'est la vue bouddhique à laquelle il se rattache, y compris dans la tradition bönpo.
Les enseignements bouddhiques constituent le pilier à partir duquel vont prendre sens les pratiques. Selon les textes, toute pratique qui vise à atteindre l’Eveil peut être qualifiée de yoga. Le bouddhisme comprend cinq écoles : Nyingmapa, Kagyüpa, Sakyapa, Gelougpa et Youngdrung Bö.
on distingue deux phases dans les pratiques yogiques : la phase de développement et la phase de perfection.
« La phase de développement, c'est la visualisation : le yogi apprend à se visualiser sous la forme d'une déité et apprend ensuite à réciter son mantra pour mûrir le pouvoir de la déité en lui. Une fois cette étape franchie, il entre dans les yogas internes » (Philippe Cornu).
La phase de perfection consiste à travailler là encore sur les canaux subtils, les chakras, les souffles qui circulent dans les canaux et les « gouttes essentielles ». S'entraîner à pratiquer des respirations en vase par exemple – respirations spécifiques qui comprennent des rétentions et des compressions – constitue l'un des axes de la progression spirituelle dans le Vajrayâna qui comprend à la fois les pratiques tantriques et le Dzogchen.
Certaines postures peuvent rappeler des asanas hindouistes, même si l'enchaînement des postures est ici très dynamique :
« C'est un yoga actif, dynamique et vigoureux. On ne reste jamais longtemps dans les postures », précise Philippe Cornu. Sauts réalisés en posture de lotus (« bebs »), claques ou flexions, constituent quelques unes des particularités posturales assez spectaculaires et propres au yoga tibétain.
Secrets pour la plupart, ces yogas nécessitent non seulement une très bonne condition physique, mais également un engagement de longue haleine. C’est pourquoi ces yogas ne sont pas enseignés au tout-venant. Et même, si dans certains centres des stages sont ouverts à tous, il est fondamental de vérifier son intention et sa motivation spirituelle avant de s’inscrire :
« on ne fait pas du yoga avec des préoccupations mondaines pour l’hygiène, pour maigrir ou pour des performances physique » Lama Shérab Namdreul.
Le yoga physique ne constitue qu’une méthode parmi d’autres pour viser l’Eveil dans la tradition tibétaine, utile, efficace mais pas incontournable. Le corps est le véhicule terrestre pour mener à l'Eveil. Dans cet objectif on va travailler sur les canaux subtils pour le préparer, le purifier et l'assouplir à l'aide d'exercices, de postures, de relaxations. "on prend pour appui le corps physique qui est une interface avec les canaux subtils dans lesquels passent les "loung", les souffles qui sont les courants des manifestations de consciences".