VIJAYANANDA
Publié le 2 Juillet 2010
Sources
n°14 Mai/Juin/Juillet 2010
Il y a soixante ans, un jeune médecin français
qui voyage en Inde rencontre Ma Ananda Mayi,
la grande mystique bengalie.
Extraits du texte de Nicolas Gailledrat
Rompant radicalement avec sa vie précédente, il la suivra désormais dans un engagement total, nouant avec elle l'une de ces relations rares fondées entre vrai guru et vrai disciple.
Celui qui était devenu VIJAYANANDA a quitté son corps le 5 avril dernier, à l'âge de 96 ans, après des décennies d'une intense sadhana.
Depuis la mort de Ma, en 1982, il résidait dans son ashram de Kankhal, dans le nord de l'Inde, où, ainsi que Ma le lui avait demandé, il accueillait les occidentaux. Ne délivrant pas à proprement parler d'enseignement, conformément à la tradition, il répondait aux questions de chacun. Il ne se considérait pas lui-même comme un sage, mais simplement, disait-il, comme un chercheur qui avait obtenu la grâce de Ma Ananda Mayi.
...
La toute première fois que j'ai rencontré Swamiji, il y a environ quatre ans, j'eus le sentiment d'être en face d'un « gentil » grand-père, vraiment tout à fait anodin... je me suis forcé en quelque sorte à être à l'écoute attentive de ce que ce « gentil » grand-père vêtu d'orange avait de particulier à me dire, et j'observais sa manière d'être tout simplement. Il posait des questions aussi banales que : « Vous n'avez pas froid ? », « Vous avez fait un bon voyage ? », « Vous habitez à quel endroit ? » interrogations parsemées de silences qui semblaient presque gênants ; puis il reprenait : « où êtes-vous hébergés ? » Normal pour un gentil grand-père, non ?
Il racontait parfois, à la demande de quelques-uns, des anecdotes de sa vie auprès de Ma. D'autres fois, pour des questions similaires, il « envoyait très gentiment balader » ceux qui l'interrogeaient en disant « qu'il n'était pas là pour raconter ».
Petit à petit, ce personnage aiguisa mon intérêt car il ne me semblait pas aussi « lisse » que cela. Je m'aperçus de bien surprenants détails ! Comme le fait qu'il réponde aux questions des plus idiotes aux plus complexes, avec la même tranquillité et la même douceur, mais surtout avec la même certitude, voire même avec une telle réalité, une telle ampleur, une telle conviction, une présence telle que cela devenait évidence !
J'ai expérimenté directement le fait que si nous avons la réponse à un problème, alors il n'y a plus de problème, quelles que soient la qualité ou la complexité de la question ou de la problématique...
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Il vivait chaque instant avec une intensité et une tranquillité emplie d'énergie subtile et sublime. Comme si chaque instant de sa vie était le dernier, l'unique, le seul à vivre !
Ce soir-là, je compris une chose qui ne me quittera plus jamais. Ce que j'avais vu la première fois comme quelque chose d'anodin s'était transformé en une vision de l'infinie compassion.
Un notable indien a parlé de sa tombe au Père Lachaise, à Paris, comme
d'une tombe miraculeuse ; je partage cet avis. Quel cadeau !
Ma Anandamayi, merci. Swami Vijayananda, merci.
Proposé par Monique GUILLIN