​​​​​​​Mourir à Bénarès

Publié le 17 Novembre 2009

 

LES CARNETS DU YOGA

n°279 - septembre 2009

 

  par Ysé Tardan-Masquelier

 

Les hindous orthodoxes croient volontiers que mourir à Bénarès ou du moins y faire incinérer son corps et disperser ses cendres dans le Gange assure une bonne réincarnation voire une libération du cycle des existences.

 

Un peu d'histoire 

 

 Bénarès s’est d’abord appelée Kashi :  

"Kashi brille et illumine l’univers".

Kashi fait se lever l’aube de la libération pour tous les êtres, grâce au don de sa sagesse. » ( Atharva Samhitâ V, 22, 4)

 

Bouddha a prononcé son premier discours, « Sermon des quatre vérités » à Sarnath à quelques kilomètres de Bénarès.

Les Jaïns rappellent que leur fondateur historique a vécu à Bénarès.

 

Bénarès sera aussi appelée Varanasi (en pali Baranasi) à cause des rivières Varana au nord et Asi au sud.

L’empereur Ashoka ( IIIème siècle av JC ) converti au bouddhisme dote richement Sarnath en stûpa ( structure architecturale bouddhiste ou jaïna) et monastères mais il n’oublie pas sa voisine Kashi la brahmanique.

Kashi ne fait que croître et embellir atteignant son âge d’or au Vème et  VIème siècle de notre ère.  Par la suite, devenue Bénarès, elle fut la cible des musulmans qui la dévastèrent au milieu du XIVème siècle et à la fin du XVème siècle.

Sous le règne de AKBAR ( XVIème siècle ) qui voulait la paix religieuse, la ville retrouva son lustre. Elle s’affranchit du pouvoir central moghol au XVIIIème siècle.

 

Bénarès, la mystique  

Malgré son histoire tumultueuse Bénarès est restée continûment un centre d’études védiques et son rayonnement n’a cessé d’attirer des croyants et intellectuels du nord, de l’est et du sud-est de l’Asie.

Elle participe à la grande vague de bhakti qui affecte la vallée indo-gangétique à partir du XVème siècle.

Fait frappant, les grands saints de la région de Bénarès transcendent souvent les clivages entre hindous et musulmans.  Ainsi Râmânanda (1400-1470) prêche l’ouverture de l’hindouisme aux hors-castes, aux femmes et même aux musulmans.

Mais la figure emblématique d’un dialogue possible entre islam et hindouisme est Kâbir. Il apparaît comme le chef de file d’une lignée de mystiques mi-hindous, mi-musulmans voués à la dévotion la plus intense envers un Dieu invisible et inconcevable. Kâbir a vécu à Bénarès dans la deuxième moitié du XVème siècle.

A partir de l’époque d’Akbar (1556-1605) les brahmanes s’installent en nombre à Bénarès et y développent leurs écoles d’exégèse. C’est sous leur influence que Bénarès connaît une nouvelle renaissance au cours du XVIIIème siècle où les deux plus grands ghât (marches qui recouvrent le bord des cours d’eau en Inde) sont construits.

 

Au-delà de la mort, la délivrance 

L’antyeshthi, la « dernière offrande » est celle que l’hindou fait de lui-même après sa mort : après avoir accompli des sacrifices durant sa vie, c’est enfin son propre corps qu’il laisse mettre dans le feu après une dernière purification dans le Gange.

A Bénarès, ceux qui s’occupent de la crémation sont une très basse classe des intouchables, les Doms,  qui sont aussi très riches car il y a une véritable industrie de la mort : civière pour le défunt, bois pour le bûcher, offrandes rituelles etc...

 

Le fleuve

Féminines, les rivières sont des lignes d’énergie, des nadî qui courent sur le corps de la déesse-mère Inde. Toutes les rivières sont sacrées et le Veda les compare à l’aurore ou aux vaches car elles offrent un liquide nourricier.

Les populations qui vivent au bord de la rivière ont une véritable dévotion pour elle.  "Gange, ô ma mère" (de Bhairava Prasad Gupta) un roman qui se passe dans un village du Bihar en fournit un exemple. 

 

Aujourd’hui

Bénarès à repris aujourd'hui le nom de Varanasi, surnommée la cité de Shiva, elle nous fait découvrir l’hindouisme sous toutes ses facettes. Traversant la ville, le Gange accueille chaque année un million de pèlerins en quête de bénédiction, d’illumination ou tout simplement de paix intérieure.

Varanasi est un véritable choc de culture auquel il faut se préparer. La découverte de cette cité si singulière ne laisse pas indifférent et marque à coup sûr tout voyage en Inde.

 

 

Présenté par Denis Brossier

 

Rédigé par Denis Brossier

Publié dans #Spiritualité-philosophie

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