La médecine intégrative
Publié le 26 Février 2014
Santé Yoga devient« le journal du yoga »
N° 146 janvier 2014
Tout en conservant les progrès technologiques de la médecine conventionnelle, la médecine intégrative accueille des approches plus anciennes. Médecine traditionnelle chinoise, homéopathie, Ayurveda, yoga et autres disciplines se conjuguent à travers un parcours de soins coordonné avec bilan final de fin de traitement. En plein essor aux Etats-Unis, cette médecine se développe rapidement en France.
par Isabelle Clerc avec Céline Chadelat et Charles-Maxence Layet
La percée
Avec le développement des voyages, les gens ont découvert l'existence d'autres culture et pris conscience d'autres façons de soigner. La médecine intégrative, qui combine médecine conventionnelle et médecine alternative, en prenant le meilleur des deux, a trouvé chez ces patients un terrain tout préparé. Son objectif principal est de renforcer les ressources internes à travers une prise en compte de l'environnement et des comportements.
Les dépenses de santé sont telles que même les institutions tel que l'OTAN se penchent sur la question de l'intérêt des médecines intégratives dans les systèmes de soins actuels. Un groupe de travail de douze médecins et chercheurs planchent sur le sujet.
Nathalie Geetha Babouraj, médecin de prévention et yoga thérapeute à l'Institut de Santé intégrative où le yoga tient une large place, précise que « L'intégration se fait aussi au niveau des différents « corps » ou « entités » de la personne, selon le modèle des koshas du yoga : le corps physique, le corps émotionnel, le corps mental, le corps symbolique, le corps spirituel. Enfin, l'intégration, ajoute-t-elle, prend aussi forme au sein de l'équipe soignante : elle devient une équipe d'éducateurs, d'accompagnateurs. L'écoute de chaque intervenant dans la prise en charge de la personne est primordiale, ainsi que l'implication dans son propre chemin de santé, afin d'être un modèle inspirant pour la personne. » Tout est dit, ou presque.
En référence au rapport du Centre d'Analyse Stratégique d'octobre 2012, les hôpitaux français se sont engagés à investir dans la recherche et l'évaluation des médecines complémentaires... Ceci dit, plusieurs mutuelles en France s'intéressent à cet aspect de la prévention et au remboursement que ça peut engendrer : des personnes moins malades, moins dépendantes de médicaments et de soins. De plus en plus d'articles scientifiques portant sur des pratiques psycho-corporelles (mind-body medicines, dont le yoga fait partie) sont référencées dans des bases de données telles que PUBMED.
Et aux Etats-Unis
Environ 30 % des facultés de médecine nord-américaines (Etats-Unis et Canada) proposent un cursus de formation en médecine intégrative, dont des Universités de renom telles que la Harvard medical school, la Mayo clinic, la faculté de médecine de Pittsburg, où David Servan Schreiber avait contribué au développement et à la recherche de la médecine intégrative.
Cancérologue, pionnier dans le champ des médecines intégratives depuis les années 80, le docteur Isaac Eliaz pratique dans une clinique d'oncologie en Californie. Depuis 20 ans, il part en retraite deux mois par an et médite tous les matins. Ce qui l'a conduit à adjoindre à sa spécialité l'aspect philosophe et guérisseur qui était l'apanage des médecins d'autrefois.
Il nous rappelle les principes de la médecine intégrative : « Elle est fondée sur l'intégration des différentes méthodes dictées par un patient libre de s'exprimer, il n'y a pas de programme tout fait, les traitements sont individualisés, les soins sur mesure, le savoir, c'est l'information mais l'intuition profonde vient d'un esprit et d'un cœur libres, le mode de vie qui consiste à éliminer la « mal bouffe », à dormir suffisamment dans le calme et l'obscurité (ce qui augmente le taux de mélatonine), à réduire le stress par la marche, la danse, l'art ou le yoga, est essentiel ».
Pour lui, la méditation est à la fois plus simple et plus efficace en cas de dépression que les antidépresseurs : « Elle améliore les fonctions cardiovasculaires, la mémoire, le système immunitaire. Quand on s'ouvre vraiment, on choisit mieux nos priorités et on prend les bonnes décisions ».
Yogathérapie, une démarche volontaire
Le 2ème Yoga Festival Paris qui s'est tenu en octobre au Centquatre à Paris a organisé des tables rondes & conférences sur l'approche de la santé et le traitement de la douleur par le yoga. Lionel Coudron, Bernard Bouhanchaud, (ci-contre) le docteur Khuner-Borel et Nathalie Geetha Babouraj étaient là pour discuter avec le public de l'apport et de l'intégration du yoga dans les processus de soins préventifs et en hôpital. Ces paroles viennent compléter ce dossier.
Les séances de yoga thérapie sont proposées en complément de soins et, parfois, le patient lui même reste le dernier convaincu. Car quand douleurs et souffrance s'ajoutent à la lourdeur de certains traitements chimiques, quels bénéfices attendre de la yogathérapie ? « Puisque nous n'avons aucun instrument qui agisse sur le système – ni aiguilles d'acupuncture, ni manipulations, ni massages – il faut une véritable demande initiale de la part de la personne » explique Bernard Bouhanchaud.
Mais comment choisir l'expérience de la yogathérapie dans ce qui relève du non-choix de la maladie ? Pour lionel Coudron : « la yogathérapie procède d'une implication dans une relation duelle, d'individu à individu. Auprès des personnes qui ne sont pas au départ très motives par le yoga, c'est l'application d'outils concrets qui va induire le processus de décision ».
Au sein des hôpitaux, on cherchera ainsi l'abord mécanique, physique du problème. « Sur le plan physiologique, une posture de yoga faite en conscience va avoir une action locale, mais avec l'avancée des neuro-sciences on sait maintenant que cela agit aussi sur certaines parties de cerveau a douleur », explique le docteur Khuner-Borel...
« remettre du mouvement dans le corps va faire du bien à la personne et lui donner envie de recommencer, tout simplement. Tous les médicaments ne pourront pas agir sur cette part de nous qui compose notre âme, notre énergie », insiste le docteur Coudron...
Acceptation et responsabilité du patient, deux aspects importants de la médecine intégrative, rappelle Nathalie Geetha Babouraj. « Il s'agit d'être acteur de sa vie, lance finalement Lionel Coudron (ci-contre). Un grand nombre de pathologies sont liées au sentiment que notre corps nous échappe. Lui redonner du pouvoir est donc un élément majeur de guérison ».
Les bienfaits démontrés de la yogathérapie approfondissent notre compréhension du yoga traditionnel tel qu'il nous est parvenu, comme un témoignage vibrant de ce que l'Inde nomme « science de la vie » ou ayurveda. Renforcer le positif, retirer le négatif et accepter ce qui ne peut être changé : le trépied de toute psychothérapie, et une pensée présente au sûtra I du deuxième chapitre des yoga-Sûtras : « action-réflexion-acceptation ». Lucile de la Reberdière
POUR ALLER PLUS LOIN :
« Le guide de la médecine globale et intégrative », Dr Luc Bodin, Albin Michel
http://ecim.pro/
Prochaine rencontre à Aix en Provence, en avril 2014, sur les thèmes des maladies auto-immunes et de la dépression, www.quantiqueplanete.com
Documentaire américain sur les centres de médecine intégrative :
Proposé par Monique Guillin