l'émerveillement - Nouvelles clés n°64

Publié le 4 Mars 2010

Nouvelles clés n°64
par Denis Brossier


Votre enfant intérieur détient les clés

Extraits de l'entretien avec Emmanuel et Marie-France de Coquereaumont

Souvent vécu comme une émotion agréable mais passagère, l’émerveillement est fondamental pour notre équilibre et notre créativité. Cette aptitude, qui prend sa source dans l’enfance peut s‘endormir. Avec Emmanuel et Marie-France de Coquereaumont, auteurs de Réveillez vos ressources intérieures, nous faisons le point sur la nature de l’émerveillement, sa force, ses voiles et les façons de le retrouver. Il s’agit de réhabiliter en nous une qualité essentielle mais négligée et méconnue, souvent assimilée à de la naïveté, alors qu’elle est l’une des bases de la vraie maturité.

Propos recueillis par Catherine Maillard


Nouvelles Clés : Entre émotion, ou aptitude, comment pourriez-vous définir l’émerveillement ?

Emmanuel de Coquereaumont : L’émerveillement, selon moi, repose sur une perception unifiée de la réalité, qui suscite une émotion fugace de bien-être. S’émerveiller demande alors une certaine aptitude à se perdre au sens de s’oublier, pour s’unir à la beauté et à la grandeur du monde. Cette union nous permet d’accéder au vrai à l’universalité qui se cache derrière les choses les plus anodines de la vie. À ce titre, le renard de St Exupéry évoque l’émerveillement quand il dit au Petit Prince : “ On ne voit bien qu’avec le cœur, l’essentiel est invisible pour les yeux. » Il me semble que l’émerveillement pourrait relever de notre capacité à percevoir l’invisible, à nous unir à une conscience universelle et à redécouvrir la source sacrée de la créativité.

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N.C. : En quoi cela peut-il changer notre rapport au monde ?

M-FdC : Nous passons notre temps à interpréter plus qu’à voir. Nous projetons du contenu, au lieu de nous laisser toucher... Comme le souligne le poète et essayiste Michael Edwards dans son livre (1)« l’émerveillement, qui peut naître devant la splendeur d‘une montagne (...) est avant tout l’impression d’autre chose, l’aperçu d’une profondeur d’être, un seuil, une porte qui s’entrebâille. » Nous émerveiller peut nous rendre notre responsabilité de co-créateur de notre réalité. Dans le soufisme, il est dit que la création, ce mystérieux surgissement de l’être est un acte d’émerveillement. Le lien entre l’émerveillement et la création est un point crucial... Sans émerveillement c’est la source de notre créativité qui se tarit.

EdC : Einstein aussi le disait : « le plus beau sentiment qu’on puisse éprouver, c’est le sens du mystère, c’est la source de tout art véritable, de toute vraie science. Celui qui n’a jamais connu cette émotion, qui ne possède pas le don d’émerveillement ni de ravissement, autant vaudrait qu’il fût mort : ces yeux sont fermés. » Nombre de personnes ne se sentent pas créatives et subissent leur vie, car elles restent aveugles aux ressources qui se cachent en elle.

N.C. : Toutefois, la frontière entre l’émerveillement et la naïveté est parfois fine...

EdC : J’aimerais citer le poète Michael Edwards qui aime à poser qu’il n’y a rien de plus adulte ni de plus sérieux que de s’émerveiller. Nous agissons de façon infantile et naïve, lorsque nous confondons merveilleux et miraculeux. Le miraculeux est fonction de l’attente que quelque chose d’extérieur à nous résolve toutes nos difficultés, et de fait nous éloigne de nos ressources. L’attente illusoire du miraculeux est le signe infaillible de l’ignorance que tout est merveilleux... La où le merveilleux crée du lien et enrichit notre vie, la naïveté induit de l’attente et peut s’accompagner de bien des déceptions. S’émerveiller, c’est se laisser toucher par la beauté des choses, (sans aucunes attentes) alors que le naïf veut voir de la beauté partout.

Rédigé par Denis Brossier

Publié dans #Spiritualité-philosophie

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