Hommage à Vimala  Thakar

Publié le 29 Septembre 2009

Les Carnets du Yoga

N° 278 - Juin 2009 


« Méditer c'est entrer en communion directe

avec la vie telle qu'elle est réellement »

Vimala  Thakar

Par Patrick Delhumeau

Parmi les grands maîtres spirituels de notre époque, Vimala Thakar était une femme libre, amoureuse de la vie.

 Le mercredi 11 mars 2009 tomba la nouvelle du décès de Vimala  Thakar. (…)

Vimala est née à Akola, dans le Mahârâstra, près de Bombay le 15 avril 1923, elle y grandit dans un climat très ouvert aux différentes religions et philosophies. Vimala s'est très tôt passionnée pour la quête spirituelle et dit devoir beaucoup à l'amour de ses parents, mais aussi à leur exceptionnelle ouverture d'esprit.

 

Au terme de ses études, elle a alors 19 ans, elle part dans les Himalaya passer trois mois dans une grotte où Swâmi Ramtirth a vécu. Là, dans une solitude totale, elle fait l'expérience d'une conscience sans égo, de certains phénomènes intérieurs et aussi d'une énergie particulière, d'un autre ordre que celle que l'on connaît ordinairement. Affaiblie par ses austérités, elle a un accident : lors d'un bain dans le Gange, elle se trouve emportée sans force, puis inconsciente. Des disciples de Swâmi Sivananda, qui voient flotter son corps, la sauvent in extrémis. Elle interrompt sa quête himalayenne et retourne chez ses parents.

 

 Au cours d'un voyage aux Etats-Unis et en Angleterre elle s'imprègne des disciplines scientifiques et des réalités technologiques. A cette époque elle rencontre Vinoba Bhave, héritier spirituel de Gandhi, soucieux de promouvoir une révolution sociale non violente dans la société indienne. Elle entre dans le mouvement Bhoodan et pendant huit ans elle visite presque tous les Etats de l'Inde, tenant des meetings, organisant des camps de travail, collectant des dons de terres pour les distribuer aux paysans. C'est une période d'intense activité et de surmenage.

 

 Au cours de ses voyages, elle prend conscience des méfaits causés par le racisme et les nationalismes de toutes sortes, ainsi que de l'impuissance des politiques à rendre les hommes libres et heureux. Elle connaît alors une crise spirituelle profonde. Toutes ses certitudes et ses assurances étant remises en cause, elle parle d'une nouvelle et douloureuse naissance. La rencontre avec Krishnamurti joue un rôle important dans ce retournement et fait basculer son désir de révolution sociale en une exigence préalable de transformation personnelle à laquelle elle se livre sans réticence.

 

 Commencent alors de longs voyages à travers le monde pour partager à qui veut l'entendre sa conviction sur la nécessité d'une libération intérieure. Récusant, comme Krishnamurti, le principe d'autorité en matière spirituelle, Vimala ne propose pas un enseignement hiérarchique cadré, mais un compagnonnage dans la recherche : « Je ne suis pas une autorité qui fait des exposés ou des discours. Je partage avec des amis, et ce partage est méditation. »

Dans les années 60, 70, 80, elle anime de nombreuses rencontres à travers le monde et de nombreuses retraites en Europe (surtout Hollande et Italie).

 En 1987 elle fut invitée par Gérard Blitz à Zinal pour parler du Raja yoga. A sa demande commencent des séminaires où Vimala va partager sa lecture des Upanishads, de la Bhagavad Gîta, des Yogas sûtras de Patanjali avec essentiellement des professeurs de yoga d'Europe et d'ailleurs. Elle sera toujours très positive dans son regard sur les traditions et textes anciens de l'Inde, bien que très sévère avec ce qu'elle considère comme des déviations, des mésinterprétations du message des rishis...

 

 En 1991, après 30 ans de pérégrination dans 22 pays, Vimala interrompt ses voyages. Dans les années qui suivent, elle cantonne ses interventions en Inde... Pas de structure, pas d'ashram, chacun trouvait à se loger à l'extérieur. Son enseignement comprenait des temps de silence et des conférences. Elle était pleine de bienveillance et d'humour. Pendant ces sessions, de deux ou trois semaines, elle savait éveiller un questionnement profond et nous faisait partager sa vision des grands textes cités plus haut....

 

 Avec elle, ces textes traditionnels anciens devenaient d'une actualité incroyable, et les valeurs qu'ils recelaient pouvaient alors s'inscrire dans la réalité de notre quotidien. Ayant elle-même fait l'expérience de ce principe du tout (Ishvara), elle savait expliquer l'importance du fait de vivre en s'y dédiant.

 Les points essentiels de son message consistent à développer une nouvelle conscience humaine libre de toute autorité - à commencer par celle de l'égo, - promouvoir une révolution intérieure et relationnelle assez dynamique pour se répandre à travers toute la société, - s'y acheminer par la voie d'une méditation toujours plus attentive au quotidien et d'une compassion toujours plus aimante... Elle était à la fois encourageante et exigeante.

 

Vimala parle d'auto-éducation :

 « Est-il possible d'éduquer l'esprit à regarder innocemment, simplement ?... Jour après jour, dans les relations et la solitude nous devons nous entraîner nous-même à observer. »

 « Observer, c'est regarder attentivement, objectivement, sans évaluer ni juger. »

 « Acte difficile », ajoute-t-elle, en remarquant que surgit très vite le fantastique mouvement ou mécanisme d'interprétation, d'évaluation et de jugement qui nous habite.

….

Apprendre à être dans le silence demande que nous nous mettions à part un certain temps, dans un endroit tranquille, où nous ne serons interrompus ni par du bruit ni par des distractions...

 « Méditer, c'est être le tout, rayonner l'amour, la compassion et la paix de la divine unité. »

 Ce rayonnement bienveillant, cette compassion paisible sont, pour Vimala, le fruit et le critère d'une vraie méditation qui ne saurait couper du monde et des gens mais qui y renvoie, avec une intensité jamais vécue auparavant. ?

 Merci Vimalaji, nous continuons sur le chemin de la pratique et du partage auquel tu nous as invités.

 

 Paroles extraites d'un recueil édité par Les amis de Vimala, en Hollande, en 1989 :

            « N'aie pas peur de la vie...

Vivre, c'est être en mouvement avec la créativité de la vie.

Vivre, ce n'est pas imiter, obéir ou répéter.

Vivre, c'est l'émanation de la créativité à travers ton regard, tes mots, tes attitudes dans tes relations. »

 

« Ne vis pas de connaissance, mais de compréhension

La connaissance est un passé mort, la compréhension est un présent créatif

Lorsque la créativité remplit l'aujourd'hui, tout le futur descend sur la terre.

Le futur c'est maintenant, le futur c'est ici, le futur est éternel Présent. »

 

Présenté par Monique Guillin

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Rédigé par Denis Brossier

Publié dans #Spiritualité-philosophie

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