Se promener en forêt renforce notre système immunitaire

Publié le 18 Août 2021

KAISEN

N° 57 – juillet-août 2021

 

      Laurent Tillon, biologiste, ingénieur forestier à l'ONF

 

Pourquoi avons-nous besoin de la forêt ?

En ces temps de pandémie, chacun réalise à quel point la nature peut lui manquer, et particulièrement les grands espaces comme la forêt, symbole de liberté. Nous en avons besoin d'un point de vue psychologique, et ce bien-être ressenti en forêt s'explique de façon biologique :

Pour résister aux attaques extérieures – un insecte dévoreur de feuilles, par exemple – les arbres produisent des molécules chimiques. Certaines de ces molécules sont transmises dans l'air pour prévenir les autres arbres de la forêt, mais il n'y a pas qu'eux qui en profitent ! Les promeneurs aussi ! Elles déclenchent chez l'homme des productions de lymphocytes, bouclier face aux bactéries et aux virus.

 

Oui ! Se promener en forêt ou s'asseoir au pied d'un arbre renforce notre système immunitaire !

Mais ce n'est pas tout : après une agression, lorsque l'arbre cicatrise, il produit des ions négatifs, dont certains s'échappent également dans l'air et ont pour effet de réduire le taux de cortisol, l'hormone du stress chronique. Ces ions réduisent aussi le rythme cardiaque et, par effet domino, les risques cardiovasculaires. Ces découvertes sont récentes. Nous les devons notamment à des chercheurs japonais qui, dans les années 2010, ont étudié les bienfaits de pratiques comme la sylvothérapie. Pour que cela soit efficace, il faut que l'écosystème fonctionne bien.

 

Qu'est-ce qu'une forêt qui fonctionne bien ?

C'est une forêt diversifiée, avec du bois mort naturel, de la végétation pouvant entraver le déplacement, des essences variées, des champignons, de la faune... Une biodiversité qui communique en réseau.

Par exemple, les champignons ne savent pas synthétiser les sucres pour croître et fructifier.  Ils ont besoin d'aide, les arbres leur permettent de récupérer les sucres via ses racines. En échange, le champignon lui permet d'accéder à des oligoéléments et d'être connecté à ses congénères...

La faune joue aussi un rôle important dans cet écosystème, notamment le loup : prédateur des chevreuils et autres espèces qui mangent les jeunes pousses, il entraîne un comportement de vigilance et de fuite chez ses proies, permettant le renouvellement de la forêt. La connaissance de ces interactions devrait inciter gestionnaires et législateurs à revoir leur politique de la forêt.

 

Comment revoir les modèles de gestion et de politique forestières ?

En ce qui concerne le loup, il suffirait d'arrêter de le tuer. Il y a d'autres façons de gérer sa cohabitation avec le pastoralisme. D'autres problématiques menacent les forêts. L'industrialisation notamment, qui concerne des parcelles privées, détenues par des investisseurs et gérées comme des champs d'arbres..., la crise écologique :

des hectares de forêt dépérissent en raison des sécheresses à répétition. Comment continuer à produire du bois ? L'humain a besoin de cette ressource autant que de contrôler tout ce qui l'entoure.

Même si, dans l'imaginaire collectif, la forêt est perçue comme un espace sauvage, elle ne l'est plus du tout. Les forêts restent quasiment toutes gérées, coupées ou plantées en fonction de nos besoins humains. ; Elles évoluent en fonction des demandes qui ne cessent de changer... L'équation n'est pas simple.

 

Êtes-vous optimiste ?

Oui, car le public et les médias s'intéressent de plus en plus à la forêt et, lorsqu'on agit, les bénéfices sont visibles rapidement. Un exemple avec la chauve-souris Grand Rhinolophe, très sensible aux pesticides. Suite à des mesures de protection... mises en place dans les années 1980, les populations ont augmenté de 30% ces dix dernières années !

Autre exemple avec les réserves biologiques intégrales : des îlots de vieux bois, dans lesquels l'homme n'intervient pas, résultat : des espèces resurgissent ! Changer de gestion fonctionne et les efforts finissent par payer. Il ne faut pas avoir peur de ce défi !

 

Proposé par Monique Guillin

 

Pour aller plus loin :

Laurent Tillon, Etre un chêne. Sous l'écorce de Quercus, Actes Sud 2021

 

Rédigé par UCY

Publié dans #Environnement-écologie

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