Scènes d'apprentissage en Orient :

Publié le 4 Mars 2015

 

SOURCES

N° 25 – janvier/mars 2014

 

« La véritable transmission se fait de cœur à cœur, le disciple étant dans une ouverture et une confiance totales, un abandon profond de sa volonté propre. Qui peut cela ? C'est héroïque. Le Maître le sait et travaillera, dans un premier temps, à ce que l'élève se purifie, avant de transmettre. L'élève le sait et acceptera les conditions que lui fait son Maître, quelles qu'elles soient, comme épreuves préliminaires. Il manifestera et approfondira alors son engagement, la vérité de son désir d'apprendre, sa détermination et sa qualité d'écoute.

Le véritable apprentissage n'est pas une affaire intellectuelle. C'est beaucoup plus subtil. C'est l'être du Maître qui passe, comme par osmose, chez le disciple, d'où les épreuves préparatoires qui précèdent cette opération alchimique, et les conditions précises et rigoureuses qui encadrent la transmission. »

Alain Chevillat (fondateur de l'association « Terre du ciel » et de la revue « Sources »)

 

Vous pourrez lire 3 récits racontés dans le Dossier "Education" de ce numéro qui sont autant de témoignages vécus, voici un extrait du premier :

  • par Joshin Sensei, moniale zen : « Accepter de réapprendre tout de zéro... »

 

  • par Marc Bonelli, pratiquant d'arts martiaux : « Avant de voler, l'oiseau doit savoir marcher! »

 

  • par Fabienne Verdier, peintre internationalement reconnue : « Je déposais mes rouleaux chaque soir devant la porte de Maître Hang Yuan. Sans réponse de sa part.»

 

« ACCEPTER DE RÉAPPRENDRE TOUT DE ZÉRO... »

Joshin SENSEI a fondé "la Demeure sans limites", un temple bouddhiste zen en Ardèche.

 Après une première expérience du zen à Paris, cette française est partie pour le Japon, sans références, mais avec une forte certitude : trouver un guide spirituel, ce qui lui apparaît alors comme la chose la plus importante de sa vie.

Cette détermination l'amènera à vivre 4 ans à Zuigakuin, modeste temple isolé dans la montagne. C'est là, comme une évidence, qu'elle reconnaît Maître Moriyama comme son maître, alors que lui la reconnaît immédiatement comme sa disciple. Ordonnée moine, elle a reçu en 1990, le Sceau de la Transmission.

 

«J'ai vécu dans cette communauté, dans ce temple, pendant quatre ans. J'avais beaucoup de travail, je me suis occupée de la cuisine du temple. Je dis cela parce que c'était un enseignement à la japonaise, un enseignement qu'on appelle « sans paroles ». Pendant les trois premières années, je ne pouvais jamais assister aux conférences que donnait mon maître parce que je n'avais pas le temps. Si on se voyait pour parler, c'était davantage pour dire ; « Combien de personnes arrivent ce week-end ? », ou bien « Il faut aller faire des courses... ».

Il n'y a eu aucun enseignement en paroles. Il y avait seulement les tâches qu'il fallait faire au moment où elles étaient à faire. C'est difficile de passer de l'état de laïque parisienne au monde japonais. Pour moi, il y avait énormément de choses à réapprendre. Il a fallu même réapprendre à marcher, à m'asseoir avec un kimono, à servir le thé. C'est difficile, il faut vraiment être comme un enfant, accepter de réapprendre tout de zéro, avec des colères, des révoltes... Et puis travailler.

Bien sûr, au début, j'avais des idées : mon maître allait me parler, m'expliquer la voie, et des tas de choses comme ça. Mais pas du tout, il me parlait, par exemple, pour me dire : « La cuisine n'est pas assez bien rangée... ». Quelquefois, j'avais de nombreuses questions, mais quand j'allais les lui poser, il me renvoyait en me disant d'aller lui préparer un thé...

 

Ce sont les façons de faire classiques des maîtres zen. Mais, on a beau les lire, quand on se retrouve devant, c'est autre chose. J'ai eu de grandes colères, vraiment.

Puis, petit à petit, tout cela tombe, les questions, les colères... A ce moment-là, mon maître a décidé - il ne me l'a pas dit directement – que j'allais être son successeur, et je pense que c'est à cet instant-là qu'il a décidé de m'envoyer aux Etats-Unis.

Quand je suis rentrée, d’autre moine s'occupait de la cuisine, et moi j'ai commencé à m'occuper davantage des gens qui venaient. Quelques étrangers venaient faire des sesshins que je dirigeais.

J'ai passé beaucoup de temps à étudier, j'ai donné des conférences, et mon maître a commencé à me donner des explications sur les textes. Ce fut une tout autre vie. »

 

Présenté par Catherine Cuney

Rédigé par UCY

Publié dans #YOGA, #Spiritualité-philosophie

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